À l’instar d’Arras, nombre de villes moyennes – comme Apt ou Nevers – sont confrontées à une double vacance, commerciale et résidentielle, en centre-ville, liée à une ancienne configuration spécifique : le commerce de rez-de-chaussée est directement relié au logement situé à l’étage, où vivait autrefois le commerçant. Pour remettre sur le marché des logements attractifs et faire revenir des enseignes, il faut séparer le logement du commerce, en créant des accès distincts. Mais cela représente des travaux importants et coûteux, qui rebutent souvent les propriétaires.
Dès son recrutement en 2017 par la mairie, Maximilien Dumoulin, chef de projet Revitalisation du cœur de ville, a travaillé main dans la main avec les services commerce, foncier et urbanisme, pour le diagnostic et le repérage des immeubles dégradés et vacants. Son bureau fait face à celui de Lucie Wodecki, manager du commerce : les échanges sont quotidiens et fructueux. « Dans certains secteurs, il est possible de réaliser des regroupements d’immeubles ; la surface commerciale est réduite afin de créer un nouvel accès spécifique au logement », explique Maximilien Dumoulin. Autre possibilité : installer une entrée commune à plusieurs commerces à l'arrière de l’immeuble, les escaliers intérieurs restant réservés aux logements. Les travaux sont financés dans le cadre du programme Action cœur de ville par la mairie – qui aide à la rénovation des façades –, la communauté urbaine d’Arras (engagée dans la réduction de la vacance locative et la rénovation énergétique), Action Logement, la région et l’Agence nationale de l’habitat (Anah).
Autre stratégie pour réduire la vacance commerciale durable : le changement de destination du local. Ainsi, « une maison étroite comprenant une ancienne boutique, vide depuis longtemps, a été transformée en colocation pour étudiants avec six chambres ; le rez-de-chaussée est devenu la grande salle commune », témoigne Maximilien Dumoulin. Entre 2019 et 2020, grâce à des relances des propriétaires par la collectivité, trois immeubles ont été rénovés dans les « hauts » de la rue Saint-Aubert, un secteur longtemps déserté. Parfois, la coercition est utilisée : « Nous avons failli lancer une procédure d’abandon manifeste, ce qui a poussé le propriétaire à vendre ; celui qui a racheté a transformé le commerce en logement », expose le chef de projet Revitalisation du cœur de ville. Toujours dans les « hauts » de la rue Saint-Aubert, des boutiques artisanales ont ouvert leurs portes : une doreuse à la feuille d’or, un ébéniste, un décorateur… « Cette fibre artisanale a pour effet d’apaiser l’ambiance du quartier », note Lucie Wodecki. Lors de l'installation de nouveaux commerçants dans les quartiers dévitalisés (rue Saint-Aubert, rue Méaulens, différentes places du quartier Ouest), la ville peut apporter une aide de 3.000 euros, pour aider à payer le loyer les premiers mois.
Au total, au cours de l’année 2020, 23 immeubles ont été rénovés, correspondant à la création de 43 logements. « Dans le cadre du programme Action cœur de ville, je travaille avec un collègue de la communauté urbaine d’Arras, la CUA, pointe Maximilien Dumoulin. En effet, la CUA a initié en 2016 un programme de lutte contre la vacance des logements. Notre binôme conseille, visite les immeubles abandonnés, réalise une étude de faisabilité et présente un montage financier récapitulant les différentes subventions possibles, qui peuvent atteindre 50 à 70% du montant des travaux. Ce qui rassure les propriétaires et les banques auprès desquelles ils veulent emprunter. » Ainsi, 34 montages financiers ont été réalisés entre octobre 2019 et septembre 2020.
Pour ce qui concerne les commerces, en 2020, « malgré la crise sanitaire, nous avons dénombré 56 ouvertures de boutiques, pour 20 fermetures », se réjouit Lucie Wodecki. Et une trentaine de projets sont « dans les cartons » pour 2021. La vacance commerciale est passée de 22% en 2016 à 9% en 2020. Seul bémol aujourd’hui : la disponibilité des locaux, dont la surface est parfois trop petite. « C’est là que le regroupement d’immeubles peut se montrer pertinent, permettant, par exemple, de fusionner deux petites cellules pour atteindre 70-80m² », précise Lucie Wodecki. Pour favoriser la « commercialité » de certaines rues et choisir les bons porteurs de projet, la ville a réalisé plusieurs études, cofinancés par la Banque des Territoires : étude avec l’ex-Epareca, devenue l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), sur les enseignes les plus attendues ; enquête de connaissance des secteurs et de leur potentiel commercial ; travail sur l’accompagnement numérique des commerces.
Pour ce qui est du budget, il faut compter deux employés à temps plein (ETP). Le poste de manager de commerce bénéficie d’une participation financière de la Banque des Territoires de l’ordre de 20.000 euros sur 2 ans. La méthodologie de travail est basée sur un dialogue permanent. Autres facteurs de succès : des réunions régulières avec les services urbanisme et foncier, la présence sur le terrain et le « rôle pivot » joué par le chargé de revitalisation, qui est aussi responsable du logement du programme Action cœur de ville.
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